samedi 15 février 2014

Récit : ça, c'est fait !



Tu me regardes depuis de longues minutes, avec cet air amusé par mon attitude. Je m'agace de n'y voir aucune réaction de ta part. Tu ris, me dévores des yeux, me caresses la cuisse lorsque je passe devant toi. J'ai les sens en effusion, je me fais un coup malicieuse, un autre plus provocatrice, je me moque un peu de toi, je te défie.
Tu fronces les sourcils. Ah... nous y voilà, c'est pas trop tôt !

Tu tentes bien de me rappeler à l'ordre. Essaye toujours, ma décision est prise : tu me fesseras, je le veux, là, maintenant, tout de suite, immédiatement !
Je papillonne autour de toi comme pour te narguer, tu ne m'auras pas non plus si facilement.
Mais tu décides de ne rien presser, tu vois clair dans mon jeu.
Je décide de passer à la vitesse supérieure, tu n'en crois pas tes oreilles, je te dis très clairement : "Et moi qui pensais que tu étais un homme..."

Ah ah, c'en est trop, n'est-ce pas ?
Et non, je ne suis toujours pas sur tes genoux, c'est quoi encore cette nouvelle technique ?
Youhou, je le sais, tu as compris depuis déjà plusieurs jours, tu le sais je n'en peux plus, il faut que ça arrive et vite.
Tu m'assènes un : "Tout se paye..." Je te renvoie un innocent : "Quoi donc ?" Puis plus rien, tu me laisses là avec cette envie qui me déchire le ventre !

Je te hais...


Tu es dans la cuisine, je suis sur le canapé, lasse d'attendre. Je te rejoins, m'adosse à l'évier. Tu te places face à moi, droit, sans un mot, avec uniquement ce regard franc.
J'ai honte de cette attitude d'enfant gâtée, de piquesse. Ton regard devient intenable à soutenir, j'abaisse mes yeux vers le sol.

 "Regarde-moi veux-tu !"
Outch, un courant d'air intérieur me traverse. Mes yeux se relèvent, difficilement mais sûrement.
 "Tu as quelque chose à me dire ?"
Euh, bah, c'est à dire que... Rahhh, j'ai compris où tu veux en venir. Tu veux que je te la demande, que j'exprime mon besoin, mon envie.
Je ne dis rien, cela ne dépend plus que de moi. J'ai horreur de ça, de cette situation, j'ai pourtant envoyé tous les signaux depuis de nombreux jours, je ne peux pas être plus claire.

Je te hais...

"Alors, j'attends... Tu as quelque chose à me dire ?"
Je sens mes joues rougir à ces mots. Tu me laisses réellement le choix de l'issue de ce petit jeu. Jeu que j'ai débuté, que je dois assumer. Je pourrais faire machine arrière, mais à quel prix ? Au prix d'une trop grande frustration, d'une immense déception mutuelle... Alors je prends ce peu de courage à deux mains : "Je mérite une fessée."
Tu réfléchis un peu et me dis : "Et pourquoi donc ?
Parce que je te provoque depuis un moment.
- Et pourquoi  fais-tu cela ?"
Arf, grillée !
 "Parce que j'en ai envie...
- Nous y voilà. Alors tu la mérites ou tu la désires ?"
Tsss quelle importance, on s'en fiche... Mais je le sais, tu veux m'amener à te dire ce que j'ai dans les tripes.



Je te hais...

"Je la désire, j'en ai besoin, ça m'obsède."
À ces mots quelques larmes m'échappent, je ne me les explique pas, je n'ai pas peur pourtant. À cet aveu, tu me réponds dans un premier temps un "Soit !"
Mon sang se glace instantanément. Cette fois on y est, je suis assaillie de questionnements. Est-ce qu'il trouve ma demande étrange ? A-t-il pris plaisir à ce jeu du chat et la souris ? Ai-je d'assez jolis sous-vêtements ? Et ma robe, l'aime-t-il ?... C'est fou le genre de questions idiotes qui peuvent parfois me traverser l'esprit, est-ce que je ne devrais pas plutôt me demander si je vais avoir mal ? Dans quelle position me donnera-t-il mon dû ? Utilisera-t-il des instruments ? Ah non, pas la cuillère en bois, c'était un jeu !

Puis tu me lances un "Va t'allonger sur le canapé, relève ta robe et baisse ta culotte, j'arrive !"
Quoi ? Mais non... J'ai besoin de tes bras avant, ceux qui me rassurent, m'aident à cet abandon. Au lieu de ça, tu me jettes. Je dois bien avoir un regard de cocker, mais tu ne te laisses pas attendrir, tu m'attrapes le bras et dans un élan me guide en direction du salon.


Je te hais...

De la cuisine, tu ne peux que m'imaginer exécutant tes ordres. Je relève ma robe, baisse ma culotte et m'allonge sur notre canapé. Tu m'interpelles pour me dire d'enfouir mon visage dans un coussin et de ne pas le relever sans que tu m'y autorises.
Qu'est ce que tu me réserves ? Je ne la sens pas cette histoire...

J'entends ses mouvements, il prend son temps le bougre !  Houla, les bruits se rapprochent... Je sens sa présence, il est là.
J'imagine son regard, que ce qu'il voit lui plaît, qu'il a peut-être envie de moi.

 "Alors comme ça tu as envie d'une fessée ?
- ...
- C'est une question.
- Oui.
- Oui quoi ?"
Mais c'est pas vrai, il n'arrête jamais avec ça ! Dans un élan d'insolence, je lui rétorque :
 "À ton avis, dans cette position ? Jouer à la crapette ?"
Je reçois une claque magistrale, le bruit ferait sursauter le plus endormi.
"Alors ?
- Je veux une fessée !
- Pourquoi ne pas me l'avoir demandée plutôt que de me faire ton numéro ?
- Parce que je n'y arrivais pas.
- Alors écoute moi bien, je préfère très nettement que tu me dises les choses, au lieu d'avoir cette attitude agaçante, tu m'as bien compris ?
- Oui !
- Je vais te faire passer l'envie de jouer de la sorte, et crois-moi qu'après cette correction dorénavant tu arriveras à me demander de te fesser, me suis-je bien fait entendre ?
- Oui."

Je te hais...

Tu t'assieds à mes pieds, tu me demandes de venir m'installer, le haut de ma poitrine s'écrase sur l'accoudoir.
Pas de préchauffage, tu tapes fort directement, je suis surprise par cette radicalité. Tu accentues la vitesse, augmente la force de tes frappes. J'ai beau gesticuler mon derrière, tu ne manques pas ta cible. Tu agis ainsi pendant un temps indéfini, je ne suis plus là de toute manière. Peu à peu je laisse derrière moi tous ces petits soucis de la vie quotidienne qui m'ont tant bouffé l'existence dernièrement.



J'y suis presque, j'atteins bientôt cette libération que j'affectionne tant et qui me procure autant de bien être. Tu m'offres, comme à ton habitude, un bouquet final alliant une rapidité qui me laisse bien peu le temps de reprendre ma respiration et cette douleur que je ne suis pas en mesure de contrôler.



J'y suis, ce moment fatidique, celui où je ne sais plus réellement qui je suis, cet instant qui libère mes larmes, ce lâcher prise tant espéré. Quel confort de ne plus avoir à penser, réfléchir, ordonner, organiser... Tu m'offres l'extase de n'être plus seulement une mère, une épouse... À ce moment, je suis... Je suis moi ! Un moi apaisé, repenti, sans artifice...
Tu poursuis encore un peu ton œuvre, tu le sais, tu ne dois pas t'arrêter trop tôt... Ni trop tard, que cela ne devienne pas insoutenable non plus.

C'est fini !
Je pleure à chaudes larmes, mais je suis bien, étrange contradiction.
Tu me redresses et m'embrasses tendrement dans le cou. Tu caresses ma nuque à présent, je te donne un baiser sur la bouche.
Nous faisons l'amour... Cette partie là nous appartient...

Nous voici allongés, épuisés mais heureux. Je suis sur toi, mon oreille apposée à ta poitrine, j'entends ton cœur qui bat la chamade, cela m'émeut. Nous restons, amoureux, ainsi, pendant de longues minutes... Puis tu me dis pour rompre le silence :
 "Alors cette fessée, était-elle à la hauteur de tes attentes ?
- C'était même mieux.
- Cela tombe bien car ce n'est pas fini.
- Pardon ?
- Oui ma douce, tu as eu ce que tu as tant désiré, mais je n'ai pas puni ton attitude de ces derniers jours."

Je te hais... Tu as ce regard satisfait, si fier de toi... Bon sang, je te hais !

Ne me dis pas que tu vas remettre ça, mes fesses ne le supporteront pas. Je tente bien un petit regard suppliant ta clémence. Tu ris !



Je te hais...

 "Pendant quatre jours, tu recevras 25 coups de cuillère en bois avant d'aller au lit, c'est compris ?"



Je te hais... Tu le sais ça ? Je te déteste !!!

 "Tu as compris ?
- Oui !
- Je ne peux pas laisser passer tes provocations intempestives, tu le sais ça ?
- Je le sais, oui.
- Tu as été trop loin, alors que tu aurais pu tout simplement me le demander. Promets-moi que dorénavant, lorsque tu auras le besoin de recevoir une fessée, tu me le diras au lieu de passer par des stratagèmes ?
- Je te le promets."

Tu me donneras chaque soir mes coups supplémentaires, qui me laisseront parfois des marques violacées, une sensation de brûlure... J'aime étrangement me sentir marquée, cela n'a pas la durabilité d'un tatouage, mais elles laissent une empreinte en moi.

"C'est fini mon ange", m'as-tu dit le dernier soir...

Je t'aime tant. 


Les petits compromis - Sophie Maurin

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